La publicité digitale, un domaine d’activité coûteux en technologies et en compétences

Nicolas Rieul et Nicolas Bouzou

La publicité digitale est un secteur d’activité haut de gamme en France, tant en termes de compétences nécessaires que de chiffre d’affaires par employé. Cela s’accompagne de coûts élevés en particulier pour la recherche et développement.

Une étude réalisée à la demande de l’IAB France et de la MMA France

Sur tous les indicateurs, le secteur de la publicité digitale se distingue par rapport aux moyennes françaises. C’est ce que montre l’étude menée par le cabinet Asterès, fondé par l’économiste Nicolas Bouzou. L’étude a été présentée le 16 novembre. Elle a été réalisée à la demande de Nicolas Rieul, représentant de l’écosystème de la publicité digitale en France. Il est Président de l’IAB France et depuis peu également Président de la Mobile Marketing Association France (MMAF).

Une étude menée pour connaître la contribution de la publicité digitale à l’économie du pays

Nicolas Rieul souhaitait cette étude afin de mieux faire connaître le secteur de la publicité digitale et de montrer que la publicité digitale apporte une contribution positive à l’activité économique en France. Le dirigeant est également directeur général pour l’Europe de Criteo, société française de technologie spécialisée dans la publicité digitale. Il souhaite par ailleurs la fusion de l’IAB France et la MMAF afin de représenter le marketing digital et la publicité digitale dans son ensemble, avec 200 entreprises membres.

L’étude décrit l’écosystème de la publicité digitale en France, avec 900 entreprises, qui emploient environ 29 000 salariés pour un chiffre d’affaires de 11,3 milliards d’euros en 2019. Ce nombre de salariés prend en compte le nombre de personnes qui travaillent spécifiquement dans le digital, par exemple chez les grandes agences de communication.

Un chiffre d’affaires par salarié de 391 000 € dans la publicité digitale

On aboutit à un chiffre d’affaires de 391 000 € par salarié travaillant dans la publicité numérique en moyenne alors que le chiffre d’affaires par employé n’est que de 149 000 € pour l’ensemble des entreprises françaises. La valeur ajoutée par salarié du secteur de la publicité digitale s’élève en outre à 114 000 € annuels, contre 76 000 € par salarié en moyenne à l’échelle nationale.

Le secteur de la publicité digitale emploie 11 000 développeurs informatiques, soit 40% de ses effectifs

La valeur ajoutée élevée par salarié s’explique par un savoir-faire spécifique en matière technologique. De fait, 40% des salariés du secteur de la publicité digitale sont des développeurs qualifiés dans les technologies, soit 11 000 personnes. Ce sont 4% des développeurs en France. Le secteur est contraint de s’adapter en permanence afin de suivre les évolutions techniques et réglementaires telles que le RGPD et d’améliorer ses performances.

Un fort pourcentage du chiffre d’affaire dans les entreprises du secteur est investi en recherche et développement, soit 6,4%, c’est-à-dire près de 730 millions d’euros par an. A titre de comparaison, le secteur de l’automobile investit seulement 2,4% de son chiffre d’affaires en R&D. Ces investissements s’accompagnent d’une croissance à deux chiffres pour le secteur, ce qui en fait un des domaines d’activité les plus dynamiques en France.

Des perspectives de recrutement élevées

Pour l’avenir, les entreprises du secteur de la publicité digitale sondées par Asterès se montrent optimistes. Elles anticipent une croissance annuelle moyenne de leur chiffre d’affaires de 14%. Un nombre élevé d’embauches est prévu. En 2021, le nombre de postes ouverts dans ces entreprises atteint 17% des effectifs actuels. Ce qui correspond à 5000 personnes. En 2022, ces entreprises envisagent de recruter l’équivalent de 12% de leurs effectifs, soit 3500 salariés.

« Dans le numérique en règle générale, l’attractivité du secteur est forte mais le turn over est très élevé »

Le défi va être d’arriver à trouver les bonnes personnes à recruter en particulier sur les aspects de R&D. Cela concerne principalement les développeurs sensibilisés à la gestion des données personnelles. Le profil d’ingénieur et de cadre d’études est parmi les plus tendus selon l’indicateur de la Dares et Pôle emploi. « Ce que l’on voit dans le numérique en règle générale c’est que l’attractivité du secteur est forte mais que le turn over est très élevé » commente Nicolas Bouzou.

L’IAB France et la MMA France veulent séduire les étudiants. « On développe avec d’autres associations un label école. L’idée est que dans toutes les écoles de commerce, du numérique et de développement [NDLR : développement logiciel], que l’on puisse attirer vers notre secteur plutôt que d’autres, parce que l’on a de gros besoins et que l’on a du mal à les satisfaire » reconnaît Nicolas Rieul. Les autres enjeux du secteur sont les évolutions de la réglementation et des contraintes technologiques ainsi que le poids de certains acteurs.

Absence de scandale sur les cookies publicitaires

Côté réglementation, Nicolas Rieul monte au créneau et veut défendre son secteur d’activité face aux critiques dont il est l’objet. Il s’insurge face au « publicité bashing » et aux attaques sur l’absence de protection de la vie privée. « Il y a un côté un peu populiste d’aller taper sur la publicité. Et notamment sur la publicité en ligne, il y a un fantasme autour des données personnelles » déclare-t-il. « Sur le sujet des cookies, sur les dix dernières années,  il n’y a pas eu un grand scandale qui concerne les cookies publicitaires  en réalité » affirme-t-il. « Ce sont des pseudonymes qui sont utilisés. On ne voit pas d’aspects négatifs pour les Français » poursuit-il.

Il pointe en outre que la presse en ligne est financée pour partie par la publicité. « On ne voit que des aspects positifs en permettant l’accès gratuits aux contenus » dit-il, présentant la publicité comme un moyen efficace pour démocratiser l’accès à des contenus de qualité sur les médias. Considérant les impacts du RGPD en France comme étant un peu passés désormais, il s’inquiète à présent de la stratégie d’un grand acteur tel qu’Apple par exemple dans le domaine de la publicité et qui crée de l’incertitude.

Pour mémoire, une plainte est en cours par l’IAB et la MMAF contre le géant Apple pour abus de position dominante sur sa gestion des messages publicitaires sur les iPhones. « Apple est très agressif sur le secteur de la publicité, où il a des ambitions, et c’est une manière de faire mal à ses concurrents pour mieux lancer sa propre offre » conclut Nicolas Rieul.

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