La loi anti « Fake News » critiquable à bien des égards

La proposition de loi passe en séance le 7 juin (Photo : François de Rugy, Président de l'Assemblée nationale)

La proposition de loi sur les « fake news » est définitivement vue de manière méfiante, comme l’exprime Pascal Froissart, enseignant-chercheur en communication sur les ondes de France Info.

La loi sur la presse suffit

Il n’en voit pas l’intérêt. « La loi de la presse fonctionne bien et s’applique parfaitement à l’ère des réseaux sociaux. Il y a des problèmes plus criants à résoudre, notamment celui des moyens. Il n’y a qu’une poignée de gendarmes et de policiers affectés à la cybersurveillance » dit-ilD’autres vont plus loin en pointant le danger d’une telle loi identifiée comme étant une censure au service de la parole officielle.


La proposition de la loi sur les « fake news » sera discutée en séance à l’assemblée nationale jeudi 7 juin. Voulue par Emmanuel Macron et élaborée au Ministère de la Culture, elle a pour but de garantir un cadre réglementaire plus strict concernant les contenus digitaux. Il s’agit, pour l’Etat français de « se protéger des ingérences extérieures ». La loi imposerait aux sites internet une transparence parfaite afin de rendre l’information accessible et établir une relation de confiance avec son audience.

Le passage en commission a permis de définir sous la pression de La République en marche, une fausse information comme étant une « allégation ou imputation d’un fait dépourvue d’éléments vérifiables de nature à la rendre vraisemblable ». Une définition qui soulève de  nombreuses questions. On peut s’interroger sur la faculté d’un fait à être ou ne pas être « vraisemblable » et sur la nécessité pour un journaliste d’établir la réalité de ses allégations tout en protégeant ses sources. Sur la base de cette définition, le texte prévoit notamment, que la justice puisse faire cesser en urgence la diffusion de « fake news ».

Des abus infinis

En outre, l’applicabilité des mesures et leur nécessité même sont encore remises en cause. « Cette loi contre les fausses nouvelles est ‘possible’ techniquement. Mais en termes idéologiques, c’est là où la chose semble irréalisable, complètement excessive ou sujet à un nombre d’abus infinis » pointe Arthur Messaud, juriste de la Quadrature du Net, toujours sur France Info.

Les modalités d’application de la loi, dont le recours en urgence à un juge qui statuera en seulement 48 heures, font également réfléchir. Cette loi permettrait donc à un juge de distinguer le vrai du faux et de censurer sur cette seule base. Une première dans le monde juridique ! Cette proposition de loi est autant une menace pour la sérénité que pour la diversité du débat public.

Côté majorité parlementaire, Nathalie Griesbeck, eurodéputée ModeM, veut souligner les conséquences des « fake news ». “Ce texte espère trouver un équilibre entre la liberté d’expression et certaines lignes rouges” dit-elle. Pour autant, cette loi peine à démontrer son utilité face au droit français du délit de diffusion de fausse nouvelle régi par l’article 27 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.

Marion Maréchal dans le viseur 

Plusieurs exemples ont déjà prouvé l’utilité de cet article, comme le démonte le site LeSoir.be, qui a publié un démenti après avoir mis en ligne, le 2 mars 2017, l’article “Emmanuel Macron, candidat préféré de l’Arabie Saoudite », repris très rapidement par Marion Maréchal Le Pen sur son fil Twitter, avec un point d’interrogation toutefois. Le juge appréciera-t-il le poids du « ? »

Joëline Studer

Joëline Studer est passionnée par le continent asiatique et sa capacité d’innovation. Rigoureuse et dynamique, le groupe de luxe Louis Vuitton lui a confié la création d’un journal digital. Elle s’implique dans l’aide à la réinsertion d’ex prostituées en collaborant à un atelier artisanal de cartes postales aux Philippines depuis 2013, afin de revendre leurs créations.

Une réaction sur “La loi anti « Fake News » critiquable à bien des égards” :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *