Marché numérique européen : six géants du web devront faire plus de place à la concurrence

Géants de la tech en Europe : les règles du jeu changent

Afin d’améliorer la libre concurrence dans l’espace numérique européen, la Commission européenne publie la liste des six sociétés qui à cause de leur puissance vont être soumises à de nouvelles règles plus strictes. Ces six géants du web – quasiment tous américains – devront faire plus de place à la concurrence d’ici le 6 mars 2024. Ils ont été baptisés « contrôleurs d’accès » car ils tiennent le marché numérique européen entre leurs mains.

Les 6 géants du web et leurs services concernés en Europe (Cliquer pour agrandir)



Empêcher de fausser la concurrence

Ces six sociétés sont considérées comme contrôlant l’accès au marché que ce soit pour les consommateurs ou pour les entreprises et pouvant fausser la concurrence. Il s’agit de Alphabet (maison mère de Google), Amazon, Apple, ByteDance (TikTok), Meta (Facebook, Instagram, WhatsApp) et Microsoft. Le but est d’accélérer les sanctions en cas de pratique anticoncurrentielle « Il était grand temps que l’Europe fixe dès le départ ses règles du jeu, en fournissant un cadre juridique clair et applicable plutôt que de devoir s’appuyer sur de longues enquêtes antitrust pas toujours efficaces » se félicite Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur.

Les six contrôleurs d’accès ont 6 mois pour se conformer aux obligations du règlement sur le marché numérique

L’objectif est d’éviter que ces sociétés ne verrouillent le marché à leur profit. Au total, 22 services essentiels fournis par ces six contrôleurs d’accès ont été désignés. Les six contrôleurs d’accès disposent de 6 mois pour se conformer aux obligations fixées par le règlement sur le marché numérique, DMA (Digital Market Act), pour chacun de leurs services de plateforme essentiels désignés. Un contrôleur d’accès constitue un point d’entrée clé entre les consommateurs et les entreprises pour interagir avec les services de plateforme essentiels.

Les contrôleurs d’accès doivent se conformer à la liste complète des obligations et interdictions. Celles-ci sont prévues par le DMA afin d’offrir davantage de choix et de liberté aux utilisateurs finaux et aux entreprises utilisatrices des services des contrôleurs d’accès. « Le règlement fixe une liste de 26 obligations précises et directement applicables par les géants du numérique » réagit Jean-Noël Barrot, ministre délégué au numérique. « Ces nouvelles règles permettront de protéger 10 000 plateformes en lignes actives en Europe et de renforcer la liberté de choix des utilisateurs européens » insiste-t-il.

Sanction jusqu’à 10% du chiffres d’affaires mondial

Des amendes allant jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial total de l’entreprise, pourront être infligées aux contrôleurs d’accès qui ne respectent pas les obligations fixées par le règlement sur les marchés numériques. Ces amendes pourront aller jusqu’à 20 % en cas d’infraction répétée.

La Commission européenne peut obliger un contrôleur d’accès à vendre tout ou partie d’une activité ou interdire une acquisition

En cas d’infraction systématique, la Commission européenne peut adopter des mesures correctives supplémentaires, telles qu’obliger un contrôleur d’accès à vendre tout ou partie d’une activité ou lui interdire d’acquérir des services supplémentaires en rapport avec l’infraction systémique.

Le DMA vise à assurer une saine concurrence sur le marché unique numérique européen en encadrant l’activité de certains « contrôleurs d’accès » ou gatekeepers et à développer des solutions interopérables. Les géants devront permettre à des tiers d’interagir avec leurs propres services, ce qui signifie par exemple que les plates-formes plus petites pourront demander que les plates-formes de messagerie dominantes permettent à leurs utilisateurs d’échanger des messages, d’envoyer des messages vocaux ou des fichiers via des applications de messagerie.

Eviter de verrouiller les utilisateurs dans une seule application

Le DMA veut donner un plus grand choix et éviter l’effet dit de « verrouillage » des utilisateurs où ils sont limités à une seule application ou plate-forme. Les grandes plateformes ne pourront plus empêcher les utilisateurs d’utiliser des applications et des magasins d’applications tiers. Apple par exemple ne pourra plus verrouiller les apps installables sur l’iPhone uniquement depuis l’Apple store, idem pour Google Play. Amazon pour sa part devra permettre aux commerçants d’accéder aux données générées par leur activité sur sa plateforme. Par ailleurs, les six sociétés ne pourront pas traiter les données personnelles des utilisateurs pour de la publicité ciblée en croisant les données de leurs différents services, sauf si le consentement est explicitement accordé.

Le DMA interdit les rachats prédateurs d’entreprises effectués par les géants du Web ou le fait de privilégier leurs propres services

Toujours côté régulation de la concurrence, le DMA interdit d’autre part les rachats prédateurs d’entreprises effectués par les géants du Web ou le fait de privilégier leurs propres services comme Google a pu le faire avec Google Shopping. Jean-Noël Barrot souligne que les géants du numérique ne pourront plus classer leurs produits et leurs services plus favorablement que ceux de leurs concurrents. Les géants de la tech devront prévenir les autorités dès qu’ils rachèteront une société et ne pourront plus collecter de données sans le consentement de leurs utilisateurs.


Désormais, l’ouverture et l’interopérabilité sont au programme. « Il sera possible d’utiliser d’autres magasins d’applications que ceux d’Apple et Google, d’effacer les applications pré-installées et de choisir les applications par défaut. Un message envoyé depuis une messagerie comme WhatsApp pourra être reçu sur une autre messagerie » illustre Jean-Noël Barrot.

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