L’Assemblée nationale entame l’examen de la proposition de loi « France Médias », adoptée en commission et portée par Rachida Dati, ministre de la Culture. Ce projet sera examiné à l’Assemblée nationale lundi 30 juin et mardi 1er juillet. L’objectif annoncé est la création d’une holding unifiée pour France Télévisions, Radio France et l’INA (Institut national de l’audio visuel, la mémoire de l’audio visuel français).
La ministre de la Culture est soutenue activement dans son projet par Delphine Ernotte, l’actuelle PDG de France Télévisions reconduite récemment par l’Arcom, afin de disposer d’une holding publique unique dès le 1ᵉʳ janvier 2026. L’enjeu est clé alors que le budget de l’audio visuel public est sous pression et soumis à des critiques récurrentes.
Mutualiser les ressources et accélérer le numérique
La réforme a déjà été tentée à plusieurs reprises. Le but annoncé est de simplifier la gouvernance de l’audio visuel, de mutualiser les ressources, d’accélérer les synergies numériques et de renforcer la cohérence de l’offre éditoriale. Le cabinet d’avocats Eliott & Markus, spécialisé en droit du numérique, de la communication audiovisuelle et de la régulation des opérateurs publics, constate que derrière la promesse de rationalisation, le texte de loi cristallise les tensions et que rien n’est tranché.sur le modèle économique, l’indépendance des rédactions, la visibilité internationale et le rôle du numérique.
Le discours gouvernemental en créant un pôle public consolidé, est d’annoncer que l’audiovisuel français sera mieux armé face aux plateformes mondiales. L’exemple donné par Delphine Ernotte est de se placer dans les pas de la BBC. Le cabinet Eliott & Markus relève que des voix s’élèvent contre le projet et le qualifient de « fusion précipitée ».
France Medias Monde exclus du dispositif
Quelle sera la garantie d’indépendance éditoriale réelle ? Quelle place sera laissée à la diversité des lignes et des identités des médias historiques ? Le cabinet d’avocats pointe que France Médias Monde ne fait pas partie du périmètre de la holding et que cela pose des questions sur l’avenir de l’audiovisuel extérieur. Pourquoi exclure la dimension internationale dans un projet censé défendre la souveraineté culturelle ? D’autant plus quand Delphine Ernotte donne la BBC comme exemple à suivre, le groupe britannique étant reconnu à l’international.
Eliott & Markus insiste sur le volet numérique du projet. Le cabinet d’avocats rappelle que l’audiovisuel vit dans un contexte où les usages évoluent rapidement avec la montée en puissance des plateformes de streaming, la radio à la demande, l’usage de l’IA dans la production de contenu. Dès lors, à quoi vont ressembler les écosystèmes numériques ?
Quel responsable pour le développement numérique du nouveau groupe
Eliott & Markus interroge les aspects numériques pratico-pratiques de la réforme. Qui sera responsable de la stratégie de développement numérique du nouveau groupe ? Comment la protection des données des utilisateurs dans des plateformes mutualisées sera-t-elle assurée ? Comment cette nouvelle entité audiovisuelle gérera-t-elle les obligations européennes imposées par le DSA (Digital Service Act), le DMA (Digital Market Act) ou les directives SMA (Services de Médias Audiovisuels) ?
De même, en regroupant les infrastructures techniques et les moyens de production, cela peut générer des risques en matière de cyber sécurité, de concentration éditoriale ou de dépendance technologique. Enfin, le projet permettra-t-il réellement de soutenir l’innovation ou risque-t-il, à terme, d’unifier les lignes éditoriales au profit d’une logique de marque unique ? D’autant plus, que Delphine Ernotte défend la marque unique France.tv pour l’ensemble du groupe actuel avec l’argument d’une meilleure reconnaissance à l’international.
Grève illimitée chez Radio France à partir du 26 juin
Toutes ces interrogations interviennent alors que ce jeudi 26 juin est le premier jour de la grève illimitée à Radio France. Le mouvement s’oppose aux restrictions budgétaires et à la réforme de l’audiovisuel public. L’appel à la grève a été déposé par les organisations syndicales. « En raison d’un mouvement de grève nous ne sommes pas en mesure de diffuser tous les programmes de nos antennes » indique Radio France.
Etonnamment, Radio France republie intégralement l’argumentaire des syndicats qui décrit l’appel à la grève comme visant à « défendre Radio France, ses radios, ses métiers, sa production, ses formations musicales, et s’opposer au projet de holding de l’Audiovisuel public » .A France Télévisions et à l’INA, les syndicats appellent à la grève à partir de lundi 30 juin.
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