Le nutri-score et la formation des marketeurs à reconsidérer pour une alimentation saine


Une bonne alimentation est un enjeu clé pour la santé. Et malgré l’introduction du Nutri-score, on ne va pas dans la bonne direction considère Nathalie Hutter-Lardeau, spécialiste du marketing alimentaire et fondatrice d’Evidence Santé.

Les actions dans l’agro-alimentaire à revoir

La dirigeante a pris la parole à l’occasion d’un événement organisé sur le thème de « le marketing alimentaire peut-il être responsable ? » le 29 octobre. Elle se montre critique vis-à-vis de la hiérarchie actuelle des actions des entreprises de l’agro-alimentaire, de la grande distribution et de la formation des responsables marketing de l’alimentaire. Les entreprises de l’agro-alimentaire se sont lancées dans l’optimisation des Nutri-scores de leurs produits. C’est bien, mais ce n’est pas la priorité, selon elle. Il faut miser sur les rituels des repas, jouer sur les quantités et la diversité de l’alimentation. Quant aux responsables du marketing alimentaire, ils ne connaissent pas la nutrition. Il faut les former afin d’éviter qu’ils ne proposent des produits complètement décalés, qui n’ont aucun intérêt, ajoute-t-elle.

« Aux Etats Unis, l’affichage de toutes les valeurs nutritionnelles n’a pas permis au consommateur de faire des bons choix« 

La mise en avant des valeurs nutritionnelles des aliments lui semble une mauvaise voie. « Je pense que l’on fait fausse route sur certaines de nos actions, notamment la connaissance des valeurs nutritionnelles des aliments. Cela ne nous permettra pas de mieux manger parce que c’est beaucoup plus complexe que cela » dit-elle. « D’ailleurs on le voit aux Etats Unis, l’affichage de toutes les valeurs nutritionnelles n’a pas permis au consommateur de faire des bons choix » affirme-t-elle. Le Nutri-score a toutefois permis d’améliorer les produits. « On voit que depuis un certain nombre d’années cela a permis d’optimiser les produits » reconnaît Nathalie Hutter-Lardeau. « On voit toute l’énergie qui est mise par les entreprises de l’agro-alimentaire pour passer du Nutri-score D à B. C’est quelque chose qui est important, mais qui n’est pas la priorité à mon avis. Auparavant, il faut redonner du sens au repas, à la variété, et c’est un lien direct avec la santé » déclare-t-elle.

Autre point, « aujourd’hui, les gens qui font les produits alimentaires ne connaissent pas la nutrition. C’est quand même dommage » reprend-elle. Elle se montre partisane d’une formation ad hoc. « Je pense que cela conduirait à une spirale positive en termes de proposition de produits sur le marché ». Elle propose déjà un module de quelques heures sur « c’est quoi bien manger » centré sur la nutrition et l’alimentation, destiné aux gens qui rêvent de travailler dans le marketing alimentaire et pour les startups, afin d’éviter qu’ils ne proposent des produits complètement décalés et qui n’ont aucun intérêt.  Elle souhaite même proposer un module de « marketing alimentaire responsable » pour les étudiants en école de commerce, en marketing et en communication. « Le marketing alimentaire est spécifique puisqu’il touche à notre santé » rappelle-t-elle.

Les priorités c’est la variété et échanger durant les repas


Dès lors, le marketing alimentaire responsable doit remettre de l’ordre dans les priorités. Pour elle, la priorité notamment des populations précaires, c’est la variété de l’alimentation, c’est d’avoir des produits de qualité nutritionnelle intéressante, de remettre un peu de sens dans l’alimentation autour des rituels des repas où l’on échange. La grande distribution se voit pointée du doigt également. « Est-ce que c’est le rôle de la grande distribution de noter les produits ? Je ne vois pas l’intérêt de pouvoir mettre des produits avec des notations dans son caddy alors que l’on ne sait pas comment les produits vont être utilisés derrière » s’irrite-t-elle.

« L’alimentation c’est complexe. Malheureusement, on veut simplifier, et quand on simplifie on se dirige vers suivre des gourous ou des fake news »

Est-ce que la grande distribution ne devrait pas plutôt aider à associer les produits, interroge-t-elle. Pour elle, toutes ces notations mènent à la confusion. « La problématique du marketing responsable, c’est que l’alimentation c’est complexe. Malheureusement on veut simplifier, et quand on simplifie on se dirige vers suivre des gourous, des fake news, qui vont dans un sens et dans un autre. Ce qui fait qu’aujourd’hui le consommateur est perdu » analyse-t-elle.

Elle observe un manque de connaissances. « Le rôle d’une marque et d’un distributeur est d’apporter une connaissance qui soit adossée à une vraie expertise. Je combats toutes ces communications autour du ‘petit déjeuner idéal’,  ‘le goûter idéal’ ou ‘la boisson idéale’. Il faut associer les consommateurs à la connaissance, les associer à l’expertise que l’on peut apporter pour qu’ils puissent comprendre, l’enjeu c’est la pédagogie. Pour contrer les gourous et les fake news. Il faut des messages très simples et pas simplistes » affirme-t-elle.

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Un monde à frigo ouvert court à l’obésité

Beaucoup des soucies actuels viennent du fait que l’on est passé à un monde d’abondance, à frigo ouvert, où on peut manger ce que l’on veut quand on veut, et l’abondance est une des premières raisons du surpoids et de l’obésité. Avec le Nutri-score, l’attention s’est concentrée sur l’optimisation des produits qui n’est qu’une toute petite part des réponses à faire, pense Nathalie Hutter-Lardeau.

« L’enjeu est de faire comprendre que l’alimentation doit être personnalisée, la notion de fréquence et de portion »

« Bien sûr que cela a permis d’optimiser puisque l’on avait des produits ultra transformés, et l’on sait les risques de santé qui sont liés. On avait des produits que l’on appelle caloriques mais avec aucun élément nutritionnel intéressant. L’enjeu aujourd’hui est de faire comprendre que l’alimentation doit être personnalisée et que l’on doit adapter ses besoins et l’on doit faire comprendre la notion de fréquence et de portion au travers des rituels des repas » commente-t-elle.

Elle souhaite que le marketing alimentaire responsable fasse comprendre que l’alimentation doit être variée. « Le régime qui serait le plus adéquat par rapport à la nature humaine, c’est le flexitarisme mais Il y a aujourd’hui des gens qui ne mangent pas assez de protéines et d’autres qui en mangent beaucoup trop » commente-t-elle. « Au-delà de zoomer sur la qualité nutritionnelle des produits, il faut déjà faire comprendre que l’alimentation ce n’est pas n’importe quoi et de manière déstructurée. Et il y a la notion de plaisir qui est le facteur de survie essentiel de notre humanité. On le voit dans les périodes de confinement, toute la détresse quand les gens ne peuvent plus sortir, ne peuvent plus aller au restaurant. Ce qui est bien plus fort finalement que de consommer des produits de plus faible qualité nutritionnelle » conclut-elle.

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