Mobilisation chez l’assureur Covéa pour vraiment valoriser ses 500 000 avis clients/an

Le groupe Covéa réunit les assureurs GMF, MMA et MAAF

Connu pour ses enseignes MAAF, MMA et GMF, le groupe d’assurance mutualiste Covéa mise sur son service client pour se différencier sur un marché de plus en plus concurrentiel et confronté aux effets du dérèglement climatique.  Covéa a fortement mobilisé ses équipes métiers pour analyser ses avis clients avec le Deep Learning sur une plateforme Data ad hoc. « C’est la première fois que l’on met en contact direct la voix du client avec la direction générale » estime-t-on côté marketing.


Face à des offres souvent voisines proposées sur le marché de l’assurance, le service client de l’assureur doit répondre présent. « Dans ce contexte, notre conviction est que le service client sera le facteur différenciant entre des acteurs dont les offres restent très proches » affirme Laurent Pigelet, Directeur du marketing stratégique du groupe Covéa. « Ce facteur différentiateur, le facteur X, est au centre de notre stratégie » déclare-t-il.

L’hybridation des parcours imposée par les clients


Le groupe Covéa mise sur la joignabilité et sa disponibilité sur le digital, ainsi que sur l’omni-canalité pour répondre à l’hybridation des parcours imposée par les clients ou encore, sur l’intelligence artificielle pour pousser le bon produit au bon moment sur la bonne cible.

12 millions de questionnaires sont envoyés chaque année aux clients des 3 marques de Covéa

Depuis plus de 5 ans, le groupe a mis en place un dispositif de suivi de la satisfaction client, avec 12 millions de questionnaires envoyés chaque année aux clients de ses 3 marques, pour un taux de retour de 15 %. Cette démarche est qualifiée de plus gros dispositif sur le marché de l’assurance par Laurent Pigelet.

Cela permet à Covéa de collecter de l’ordre de 500 000 verbatim rédigés par ses clients chaque année. Ces questionnaires servent au groupe mutualiste afin d’établir des baromètres relatifs à la satisfaction client, à la recommandation et des scores d’effort (Customer Effort Score ou CES). Le CES permet de mesurer l’effort fourni par les consommateurs pour exécuter une action ou une démarche comme entrer en relation avec le service client, le SAV ou tout autre département de l’assureur.


Des questionnaires à chaud et à froid

Les questionnaires sont proposés « à chaud », lors d’un contact avec le client, ou à froid, une fois par an. Cette masse de données implique de nouveaux moyens de traitement. « Nous savions traiter les informations captées en 1 to 1, avec les demandes qui remontaient dans nos agences ou dans nos centres de relation client » indique le directeur marketing. « Etre capable de détecter les tendances de fond dans cette masse de 500 000 textes est un tout autre défi » reconnaît-il.

C’est vers les technologies d’intelligence artificielle que l’assureur s’est tourné avec son projet VoxIA, c’est-à-dire »la voix du client analysée par IA ». Pour le responsable marketing, l’objectif est simple, il s’agit de pouvoir classer les textes écrits par les clients dans un plan de classement thématique, avec un tri possible par territoire, par marque, par nature de clientèle, par métiers et par moment de vie.

Un projet mené en interne de A à Z

L’originalité du développement de cette application est que le groupe a souhaité mener ce projet en interne de A à Z, avec pour ambition de partir de l’idée métier pour aller jusqu’à la mise en production, en passant par la réalisation. « Nous n’avions alors que peu d’expérience en IA, c’était l’un de nos premiers projets industriels dans ce domaine » explique Guillaume Lemele, Directeur des solutions Digital, Data et IA de Covéa.

Une cinquantaine d’experts métiers sont mobilisés afin d’annoter les verbatim

« Nous avons démarré avec un Data Scientist qui a commencé à travailler seul sur l’analyse sémantique et a entraîné des modèles de plus en plus performants » dit-il. Le projet va rapidement prendre de l’ampleur. Une cinquantaine d’experts métiers sont mobilisés afin d’annoter les verbatim et expliquer à l’IA comment ils percevaient ce que le client avait écrit. « Ce fut une phase assez intéressante, car deux experts d’un même sujet peuvent avoir une compréhension assez différente d’un même texte. »

Outre ces campagnes d’annotation, l’équipe projet a travaillé avec les équipes marketing sur la restitution, car l’application dispose d’un cockpit qui permet de visualiser les résultats. « Il s’agit d’une application de type self-service qui rend les métiers totalement autonomes dans leurs analyses. Ils peuvent voir les thèmes sur lesquels les clients s’expriment, puis descendre dans la donnée jusqu’au verbatim lui-même. »

Des modèles de Deep Learning de type Transformers

Le Data Scientist a eu recours à des modèles de Deep Learning de type Transformers spécialisés en analyse sémantique afin de comprendre le sens des textes. L’objectif est d’extraire des thèmes depuis ces textes non structurés et de comprendre la tonalité, voire la multi-tonalité de certains de ces textes.

Pour faire face à la complexité du langage, l’algorithme doit travailler idée par idée au sein du même verbatim

Un même verbatim peut évoquer des points négatifs, mais aussi des points positifs. Pour faire face à cette complexité du langage, l’algorithme doit travailler idée par idée au sein du même verbatim. Laurent Pigelet souligne l’importance de la phase d’annotation pour pouvoir mener convenablement l’apprentissage du modèle. « Nous devions aligner une soixantaine d’experts internes dans leur compréhension de ce que les clients expriment et la perception d’avis qui peuvent être positifs, négatifs ou neutres » décrit-il.

Il y a eu une convergence des évaluations menées par les experts de Covéa.  « Ces efforts ont porté, car nous avons réussi à aligner tous nos experts sur un score de compréhension très élevé d’un sujet, d’une émotion. Nous avons réussi à aboutir à un plan de classement cohérent et partagé par trois marques qui sont, par ailleurs, complémentaires et singulières » ajoute-t-il.

La solution en production depuis 18 mois

Contrairement à beaucoup de projets de ce type, l’objectif n’était pas de monter un PoC (Preuve de concept) pour valider la faisabilité d’une telle application ou alimenter une étude ponctuelle. « La solution est en production et nous avons aujourd’hui 18 mois de recul sur son fonctionnement » se félicite Guillaume Lemele. « Notre plan de classement compte 37 thèmes dont les marques, les produits, les marchés, etc. » précise-t-il.  

« Nous supervisons les modèles sur la durée, car de nouveaux thèmes peuvent apparaître »

L’équipe mesure régulièrement les performances de ses algorithmes et vérifie que celles-ci restent au niveau des solutions du marché, les dépassent parfois. « Nous supervisons les modèles sur la durée, car de nouveaux thèmes peuvent apparaître, et un point important est que notre solution peut tourner à différentes fréquences » indique le responsable.

La fréquence de vérification est calée sur les besoins de l’assureur. «  On peut la lancer toutes les semaines, tous les jours, voire plusieurs fois par jour s’il survient un événement majeur. On peut ainsi monitorer au courant de la journée ce que nous remontent nos clients. » La solution est mise en œuvre pour faire un reporting au trimestre, au mois, voire à la semaine en cas d’événement climatique.

Identification des domaines en progrès et de ceux en recul

Avec de 500 000 à 600 000 nouveaux verbatim chaque année et un historique sur 5 ans, cette énorme masse de données permet d’identifier ce sur quoi l’assureur progresse et les points sur lesquels il régresse selon ses clients. « C’est intéressant pour étayer les prises de décision du groupe pour les investissements. Mais nous n’extrayons pas que des chiffres, mais aussi des verbatim » ajoute Laurent Pigelet.

« Nous pouvons avoir l’ensemble des verbatim de nos clients sur un thème précis. Pour une direction marketing ou une direction commerciale, c’est un excellent moyen pour convaincre une direction générale ou une DSI du besoin d’investir dans telle ou telle problématique. »

L’IA générative est appelée à monter en puissance chez Covea

Baptisée ClaudIA, la plateforme technologique mise en place permet aujourd’hui au groupe Covéa de mener des expérimentations, de préparer des modèles, mais surtout de pousser ces modèles d’IA en production de façon industrielle.

« Ce projet a mis en œuvre des modèles de Deep Learning, une IA ‘classique’ »

La plateforme s’appuie sur les ressources du Cloud Azure de Microsoft, la solution de Data Lake DataBricks ainsi que l’accès à l’API d’OpenAI pour l’IA générative qui commence à être expérimentée. « Ce projet a mis en œuvre des modèles de Deep Learning, une IA ‘classique’ » confirme Guillaume Lemele.

L’IA générative commence à être employée. « Nous utilisons aussi l’IA générative lorsque nous ne disposons pas de verbatim suffisamment nombreux sur certains thèmes pour mener l’apprentissage de nos modèles » explique-t-il. L’IA générative permet de créer des jeux de données de test. «  Nous avons recours à l’IA générative pour créer les verbatim qui nous permettent d’entraîner l’IA classique à bien thématiser ces verbatim. »

Rédiger des synthèses grâce à l’IA générative

Outre cette génération de données synthétiques, le responsable compte exploiter l’IA générative pour rédiger une synthèse d’un groupe de verbatim sur un thème donné. « Pour le moment, nous nous contentons de les présenter, mais nous allons en faire des résumés à destination des équipes marketing et commerciales » annonce-t-il.

« Nous sommes dans une approche complètement modulaire et nous pourrons changer d’IA générative si nécessaire »

Si, pour ces usages émergeants l’équipe projet a fait le choix des LLM d’OpenAI, Guillaume Lemele privilégie une certaine indépendance vis-à-vis des fournisseurs de technologies : « Nous sommes dans une approche complètement modulaire et nous pourrons changer d’IA générative si nécessaire. C’est tout l’intérêt de maîtriser nous-mêmes les technologies d’IA. Notre plateforme est modularisée et nous pensons plus en termes de fonctionnalités que de solutions. »

Maintenant que Covéa dispose du savoir-faire, de la plateforme technologique et de l’expérience des premiers cas d’usage opérationnels, le groupe va aller chercher d’autres sources d’information, notamment les réclamations. « Ce ne sont pas de nouveaux sujets qui sont exprimés via ce canal, mais l’intensité relationnelle est beaucoup plus forte. Les clients nous renvoient à ce qui est vraiment problématique et ce qui doit être priorisé » relève Laurent Pigelet.

Traitement des avis modérés ou positifs

« Nous avions une mine d’or à disposition, avec énormément de verbatim. Souvent, ceux qui étaient lus étaient ceux où le client était vraiment furieux » décrit Guillaume Lemele, Directeur des solutions Digital, Data et IA de Covea. « Les clients qui exprimaient des avis modérés ou positifs, ou nous adressaient des textes avec plusieurs tonalités n’étaient pas traités » explique-t-il.

« C’est la première fois que l’on met en contact direct la voix du client avec la direction générale »

L’analyse des verbatim devient un levier d’action majeur dans le groupe. « C’est la première fois que l’on met en contact direct la voix du client avec la direction générale »souligne Laurent Pigelet, Directeur du marketing stratégique du groupe Covéa.

« C’est aussi un formidable atout pour tous ceux qui agissent pour l’amélioration de la relation client. C’est un outil pour les futurs chantiers et futurs projets d’amélioration, car on trouve dans ces verbatim des informations que l’on ne voyait pas avant » conclut-il. Covéa est le premier assureur de biens et de responsabilité de France. Il emploie 24 000 personnes pour 26,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

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